Alors que les journées se font de plus en plus froides, que le jour décline toujours un peu plus tôt, nous vous proposons aujourd’hui une bonne dose de bonne humeur suite à notre rencontre avec Elise Delzenne. Un plaisir de retrouver cette championne positive auprès de ses proches dans un petit village du Nord de la France.
Une saison riche côté expérience.
Je n’avais jamais été dans une grande équipe. Cela m’a beaucoup apporté, concernant les tactiques de courses, l’encadrement est structuré. Chacun a son rôle, nous choisissons une capitaine de route qui donne les directives pendant la course. Parfois elle me demande de rouler en tête de peloton pendant 40 kilomètres, c’est comme ça. Je pense que c’est aussi ainsi que tu progresses. Pour certaines courses, j’ai mis plusieurs jours à m’en remettre, j’étais fatiguée. Dans mon équipe, La plupart des filles ont du faire cela avant d’être fortes. Lisa (Brennauer) et Evelyn (Stevens) par exemple ne sont pas arrivées à ce niveau là par magie.
« J’ai plus de pression que si j’étais dans une plus petite équipe. »
J’ai quand même beaucoup plus roulé cette année à l’entrainement mais aussi beaucoup plus de jours de courses. Cette année, j’ai découvert les courses par étapes même si j’en avais fait l’année dernière de deux ou trois étapes, ce n’est pas la même chose. Le Qatar avec 4 étapes, 5 étapes en Angleterre, 7 en Allemagne, le Tour de l’Ardèche, la Route de France. Ça me plait, j’encaisse assez bien les étapes même s’il y a toujours un jour où tu es moins bien. L’encadrement est vraiment aux petits soins. La récupération est importante, nous ne trainons pas après l’épreuve, nous sommes bien massées.
Concernant les transports, c’est toujours au mieux pour moi. Si je dis que je suis à Soissons, on vient me récupérer à Paris… bref, c’est toujours top. Je pense que ça joue beaucoup au fil des mois sur la fatigue.
Je dois seulement penser au vélo. Par contre, j’ai plus de pression que si j’étais dans une plus petite équipe. Au début, c’était difficile, je ne connaissais pas les filles, le directeur sportif mais après ça devient une habitude. Finalement, maintenant, dès que je ne suis plus avec mon équipe, je me sens perdue !
« Je n’ai pas l’intention de changer d’équipe. »
L’an prochain, je n’ai pas l’intention de changer d’équipe, c’est vrai que des filles vont partir, Carmen, Evelyne et Chantal… Trois filles costauds… Nous avons appris tôt dans la saison que notre sponsor allait partir. Je sais qu’il y a des équipes qui te l’annoncent au mois de septembre et tu te retrouves coincée tandis que là tout a été clair. Au début, on était toutes légèrement inquiètes mais nous en avons parlé avec mon directeur sportif et nous nous sommes concentrées sur la course. Bien sûr j’ai eu des propositions pour l’année prochaine, je n’étais pas sans rien mais quand on est bien là où l’on est, pourquoi vouloir partir ?
Immersion américaine.
J’ai été très bien accueillie. Les filles ont tout fait pour me mettre à l’aise, elles ne m’ont jamais mise de côté. Nous avons commencé par un stage en Californie où l’équipe avait loué deux maisons : une pour les filles, une pour le staff. Nous étions plusieurs par chambres, tous les jours nous faisions des binômes pour la cuisine du soir, ça permet aussi de créer des liens puisque ça changeait tout le temps. Nous avons effectué de grandes sorties à vélo, nous sommes allées voir un match de hockey…. J’ai fêté mon anniversaire en stage d’ailleurs, avec ma couronne de princesse, un bon petit repas. Ensuite, on a fait une Pinata. J’avais les yeux bandés, j’ai tapé dans une personne du staff qui est tombé en arrière (rires). Mais ça va, il ne s’est pas fait mal. Parfois les filles me ressortent l’anecdote, forcément !
Ce qui est difficile dans les courses européennes, c’est le placement avec les routes étroites. En Amérique, les routes sont plus larges, il y a plus d’argent en jeu. C’est totalement différent. Je n’ai encore jamais couru là bas mais je serai très curieuse de voir ce que cela donne.
Vivre de sa passion ?
C’est bien. Ça a des avantages bien sûr : ne faire que du vélo. Ça reste une passion.
L’année dernière, je travaillais en tant qu’ingénieur donc j’étais des deux côtés. Cette saison, je ne suis jamais près de mes proches. C’est génial de voyager comme ça, c’est une chance mais je vois rarement mon copain, ce n’est pas évident. Cette année, l’éloignement de mes proches m’a pesé.
« Je ne pensais pas reprendre le vélo. »
Je ne regrette pas d’avoir arrêté les compétitions de vélo pendant 4 ans, mais c’est vrai que je sens que je manque d’expérience. Je fais encore des erreurs. Contrairement aux autres filles de ma génération, moi cette année, c’était ma première Route de France. Cette année, c’était pour moi à chaque fois des premières fois. De vraies découvertes. D’un autre côté, quand j’ai arrêté, je ne pensais pas reprendre le vélo. Quand je suis revenue, j’étais sur-motivée. Le fait que j’arrête m’a permis de perdre pas mal de poids, en faisant beaucoup de courses à pied.
« Sur le plan technique, je partais de loin. »
J’ai encore des progrès à faire dans tous les domaines, c’est clair, mais on y travaille beaucoup avec mon entraineur. Par exemple, sur le plan technique je partais de loin, mais ca progresse, même Pauline me l’a fait remarquer. Je suis aussi souvent trop tendue sur le vélo, alors on travaille aussi sur le mental. Mes points forts pour l’instant ce sont le sprint et le chrono. Mais comme dit Lucien : « il y a du boulot ».
L’appel de la piste ?
Quand j’ai commencé le vélo en cadette, Lucien Cloet, mon entraineur actuel, qui s’occupait à l’époque des féminines dans le Nord Pas de Calais, m’a dit que je devrais faire de la piste. Je m’y suis mise mais je n’ai pas fait beaucoup de courses. En cadette 2, il m’a emmenée aux Championnats de France sur piste où je fais deuxième derrière Fiona sur la course aux points. C’était mes premiers Championnats de France. Quand on a des résultats, on aime bien (rires).
« Elise, il faut travailler ça. »
Cette année, sur la poursuite, c’était une surprise pour moi. En général, je me débrouille bien à l’entrainement mais une fois dans l’épreuve… ce n’est pas la même chose. Je suis arrivée en me disant que j’allais encore faire quatre ou cinq, je n’étais donc pas stressée et mentalement je m’étais bien préparée. Depuis les Championnats de France sur route, où je n’étais pas du tout concentrée et où mentalement ce n’était pas ça, je me suis dit « Elise, il faut travailler ça ». Le physique allait bien, j’étais en forme et puis je fais pas mal d’exercices pour me préparer mentalement. Là, je m’étais bien préparée pour la poursuite et ça c’est vraiment bien passé. Je termine la course, j’avais fait un bon temps, j’étais contente de moi mais ça arrivait encore derrière moi. Je vois les autres filles qui passent, toujours moins bien que moi… et j’ai compris que j’étais en finale. Je m’attendais à ce que Pascale me batte.
Retour d’expérience.
« Les Championnats de France, en contre temps. »
Franchement, j’étais en forme pour aborder les championnats de France mais je n’arrivais pas à me concentrer, j’étais toujours en contre temps sur la course en ligne. Tout le temps en contre temps. Par exemple, je savais qu’il fallait suivre Pauline (Ferrand Prevot) et Audrey (Cordon). Je les voyais attaquer, mon cerveau me disait « Faut que tu y ailles » mais je n’y allais pas. Même à l’arrivée, Audrey m’a dit « Mais Elise, t’étais là sans être là ».
Je ne sais pas si le chrono des France m’a coûté celui du Mondial. Je ne regrette pas de ne pas l’avoir fait. Après le Chrono Champenois, je ne le sentais pas et je pense que cela m’aurait fatiguée pour la course en ligne.
« À Ponferrada, on était persuadé d’avoir une vraie carte à jouer. »
J’ai appris assez tôt dans la saison que j’étais pré-sélectionnée pour les Mondiaux. Je pense que j’ai prouvé que j’avais ma place. On me voit pas mal devant pour aider Pauline. C’était une belle récompense de la voir sur la première marche. La clef dans notre discipline c’est souvent le placement et le travail d’équipe est ultra important. La course était très tendue, beaucoup de chutes. J’étais devant, je remontais le peloton en début de descente, une fille devant moi s’est plantée en voulant passer alors que ça se resesrrait, ce n’est pas passé loin et derrière moi j’entendais « bambambam ». C’est vrai que j’ai eu peur, je me suis même faite un peu distancer le temps de reprendre mes esprits.
Sur la ligne de départ à Ponferrada, on était persuadé d’avoir une vraie carte à jouer. Même dans mon équipe, mon Directeur sportif m’avait dit que l’on avait une très belle sélection. Après, je ne pensais pas forcément au maillot… et pourtant ! J’ai appris que Pauline l’avait emporté une fois à l’arrivée, je suis arrivée avec Amélie Rivat et on nous a dit que c’est Pauline, je demande « Pauline qui ? » et là c’est la folie. On n’en revenait pas !
Un grand merci à Elise pour sa disponibilité et la sympathie toujours au rendez-vous.