[dropcap size=big]A[/dropcap]près les classiques du printemps, place à un des rendez-vous les plus attendus de l’année, le premier Grand Tour de l’année : le Giro d’Italia. A l’heure du départ de la 99ème édition de la course au maillot rose, le Dérailleur vous invite à découvrir ses favoris déraillés et ses pépites à suivre, durant les trois prochaines semaines. Car derrière Nibali, grand favori de la course, beaucoup de coureurs possèdent un profil susceptible de surprendre les amoureux de vélo. Enfin, sauf ceux qui suivent le Dérailleur bien sûr…
Un dossier réalisé par Olivier Perrier, Gaulthier Lenôtre, Sergeï Gauthier, Romain Puissieux et Arthur Pineau
Les favoris déraillés de la rédaction
« Mon favori déraillé ? Sergey Firsanov, il est dans la forme de sa vie ! »
Sergeï Gauthier
J’aurai pu vous citer Landa, Valverde, Nibali ou autre Majka, mais c’était trop facile pour notre équipe du dérailleur, bien décidée une année de plus à vous proposer un favori déraillé. A la suite d’heures d’investigations, de recherches et de visionnages de course de l’UCI Europe Tour je vous présente ma trouvaille 2016: Il est russe et dans la droite lignée des Berzin, Tonkov ou Menchov pourrait bien créer la surprise sur ce Giro, Sergey Firsanov, le coureur qui fêtera ses 34 ans cet été prend part à son premier Giro et il est dans la forme de sa vie, jugez plutôt : 4eme du Tour du Trentin, vainqueur du Tour des Apennins, vainqueur de la Semaine Coppi et Bartali, à l’image de ses prédécesseurs cités plus haut, le russe s’éclate lorsqu’il court en Italie. Très à l’aise dès que la route s’élève il est apparu avec Landa et Kangert comme l’un des hommes fort du Tour du Trentin véritable tremplin au Giro. Inexpérimenté sur 3 semaines et accompagné d’une équipe très faible, le russe est pourtant mon gros coup de cœur pour un top 10 à Turin, il pourra compter sur l’expérience de Kolobnev et qui sait? Servira peut-être de moteur à ses équipiers.
« Fuglsang arrive dans la force de l’âge »
Romain Puissieux
Le coureur Danois a fait forte impression sur le Tour du Trentin. Il était sûrement le deuxième coureur le plus fort lors de la course Transalpine derrière l’intouchable Mikel Landa. A l’instar de l’édition 2015, Astana va se présenter au départ du Giro avec une véritable armada. Le leader désigné au départ des Pays-Bas sera logiquement Vincenzo Nibali, mais ce dernier a laissé planer beaucoup d’incertitudes au Trentin, et à plus large échelle, sur tout son début de saison. Certes, le Squale est coutumier du fait et on est habitué à le voir peu brillant avant un grand objectif. Cependant, s’il s’avérait que Nibali ne tient pas son rang sur ce Tour d’Italie comme on a pu le voir au Trentin, l’un de ses fidèles lieutenants pourrait bien prendre la barre d’Astana. En premier lieu, Jakob Fuglsang. A 31 ans, il arrive dans la force de l’âge pour une course de trois semaines et possède de solides références avec notamment une 7ème place sur le Tour de France 2013. On ne parle pas ici de victoire finale pour le Danois, mais bien épaulé par Scarponi, Kangert et consorts et avec un parcours plutôt taillé pour ses qualités, il pourrait bien être la belle surprise de l’édition 2016 et pourquoi pas ? S’approcher du podium à Turin.
« Je vois Mikel Landa s’imposer »
Arthur Pineau
Pour certains, la présence de Nibali signifie une grande performance du requin de Messine sur ses terres italiennes. Or, cette saison, le vainqueur du Giro 2013 semble un peu en retrait, en dedans comparé aux autres saisons. Il a la volonté de réussir un doublé Giro-Tour, comme Contador avait ambitionné en 2011 ou encore l’an passé, mais pour cela, il faudrait déjà que Nibali soit au top de sa forme, ce qui n’est pas le cas à mon avis. Les hispaniques ont la cote ces derniers temps sur le Giro. Après Quintana en 2014 et Contador en 2015, je vois bien Mikel Landa s’imposer. Il a montré sa force sur le dernier Tour du Trentin qui fait office de répétition pour le premier grand tour de la saison. Le coureur basque semble arriver en forme, et pour moi, il me semble être le favori de cette 99e édition. Je pense voir un Nibali en retrait, même s’il est souvent transcendé lorsqu’il est sur ses terres. Il réussira à en claquer une sans problème, mais il devrait être juste pour le général. Ce Giro offre un beau plateau, puisque Valverde sera également présent. 3e du Tour de France en 2015, et vainqueur de la Flèche Wallonne encore cette année, l’Espagnol sera un candidat sérieux au podium, en espérant que la technique des Movistar ne sera pas la même affichée que sur la Grande Boucle en 2015, c’est-à-dire se contenter de gérer la place sur le podium.
« Firsanov peut créer la surprise »
Gaulthier Lenôtre
Premier grand tour pour la formation russe Gazprom Rusvelo. Peu connue, l’équipe va pouvoir se montrer sur ce Tour d’Italie et pourquoi pas s’illustrer! Parmi les coureurs appelés au « combat », un coureur se démarque: Sergey Firsanov. Le coureur de 33 ans peut bel et bien être l’une des surprises de l’épreuve tant ses performances le font pressentir. Déjà présent sur des courses par étapes en 2015 comme le Tour d’Azerbaïdjan et le Tour de Croatie où il termine à chaque fois cinquième, il s’était également illustré sur des courses plus cotés à l’image de la Tour d’Andalousie où il a terminé 16ème avec un plateau digne des grands tours, en la présence de Chris Froome, Alberto Contador ou encore Romain Bardet.
Ce qui me fait penser que Sergey Firsanov puisse réaliser un bon Giro, est le fait qu’il confirme ses prestations. Très en vue depuis le début de la saison, il a terminé 16ème du Tour de la Communauté de Valence, en s’illustrant notamment sur l’étape reine sur laquelle il se classe 8ème devant Daniel Martin, Joaquim Rodriguez ou encore Leopold Konig. Bon grimpeur, le vétéran sait également se comporter en patron en s’imposant en mars dernier sur la Semaine Internationale Coppi et Bartali avec un parcours exigeant face à des coureurs comme Mauro Finetto, Sebastian Henao et Gianni Moscon. Enfin récemment, le coureur Russe s’est distingué en gagnant le Tour des Appenins ou en s’illustrant sur le Tour du Trentin en se plaçant sur chaque étape dans le top 10, ce qui lui a permis de finir l’épreuve à la quatrième position devant notamment Romain Bardet et Domenico Pozzovivo. S’il n’a peu de chance d’entrer dans le top 10, Sergey Firsanov peut bel et bien créer la surprise ! Capable de rivaliser en montagne et dans une forme exceptionnelle, le coureur Russe n’as plus qu’à nous montrer ce dont il est capable.
« Davide Formolo sera dans le top 5 et maillot blanc du Giro »
Olivier Perrier
C’est Rigoberto Uran lui-même qui l’a dit « Davide Formolo sera la révélation de ce Giro. » Le colombien, leader de la formation Cannondale, ne doit certainement pas lire le Dérailleur et il a bien tort. Dès l’an passé votre serviteur misait sur Formolo en « favori déraillé » du Tour d’Italie et s’il s’écroula en troisième semaine, sa victoire d’étape et sa très bonne tenue pendant les deux premières semaines nous donnèrent raison. De là à le replacer parmi nos favoris déraillés? Eh bien oui! Certes, dans son équipe le chef de file est Rigoberto Uran, de facto ça cantonne Formolo à un second rôle, mais un second rôle de luxe. Formolo aura pour mission d’épauler le plus longtemps possible Uran, entendez par là qui peut se tenir prêt à pallier une éventuelle (et probable) défaillance du colombien. Un Formolo qui affiche un état d’esprit offensif, mais aussi tourné vers le respect du leader, comme le démontre ses déclarations d’avant course, relayées par Spazio Ciclismo : « Il y a 21 étapes et il y aura de nombreuses occasions. Mais je suis ici pour soutenir Uran dans les moments clés. Du reste, en 21 jours je pourrais certainement saisir une opportunité pour moi. » Formolo, maillot blanc du Giro et dans le top 5, une côte à risquer quelques euros.
Les pépites à suivre
« Deux pépites pour le prix d’une, Jakub Mareczko et Merhawi Kudus »
Sergeï Gauthier
Le premier sera à suivre sur les sprints massifs, cette année les sprinteurs auront au maximum sept occasions de briller s’ils vont jusqu’au bout et avec de la réussite, à ce jeu-là le plateau très fourni devrait nous permettre de voir de très beaux sprints avec en têtes d’affiches: Kittel, Démare, Greipel, Ewan, Viviani, Pelucchi, Modolo, Ferrari ou encore Van Poppel ou Arndt. Derrière les cinq premiers nommés qui sont au-dessus du reste par le train, le talent ou l’expérience, je vous présente: Jakub Mareczko le jeune italien qui a célébré ses 22 ans le 30 avril et s’est fait connaitre en 2015 en remportant 11 victoires dont 9 victoires sur le seul Tour du lac Taihu en Chine (8 victoires d’étape et général final, meilleur sprinteur et meilleur jeune). En 2016 le jeune italien a déjà levé les bras 4 fois s’offrant Viviani et Sagan à San Luis, ou Greipel sur le récent Tour de Turquie. Il sera avec Colbrelli et Formolo une des pépites italienne à suivre sur ce Giro. Ma seconde pépite sera à suivre sur les étapes vallonnées et de montagne, véritable talent dès que le route s’élève, Merhawi Kudus est l’un des hommes à suivre, beaucoup plus talentueux, discret et moins « marketing » que Teklehaimanot, le moins célèbre des Érythréen du peloton retrouve cette année ses trois compatriotes (Berhane et Debesay en plus des deux premiers nommés), dans l’équipe Dimension Data. Véritable pépite chez les grimpeurs, le jeune africain manque de caisse, d’expérience et de technique, mais il a prouvé notamment sur le Tour d’Oman ,au sommet de « Green Mountain », que quand la pente se fait sévère il pouvait suivre les meilleurs, tenant longtemps la roue de Nibali et Bardet, avant de terminer sixième de cette étape derrière l’italien et le français, ainsi que Fuglsang, Dumoulin et Costa ! Sur ce Giro il ne serait pas étonnant de la voir attaquer, et profiter des durs pourcentages où le talent brut s’exprime lui permettant de gommer son manque d’expérience et ses lacunes techniques. A coup sur Kudus sera l’un des hommes à observer sur ce Giro sur lequel une place dans les 25 premiers et quelques belles étapes de montagne ne m’étonnerait pas!
« Si le Carlos Betancur de 2013 est de retour, gare aux dégâts ! »
Romain Puissieux
On savait Movistar capable de remettre sur pied Carlos Betancur mais pas vraiment la durée que cela allait prendre. Après un début de saison discret, le Colombien a retrouvé ses sensations en remportant une étape lors du Tour de Castille et Leon. On l’a ensuite vu à son avantage lors de Liège-Bastogne-Liège en dynamitant la course pour un Alejandro Valverde finalement décevant. On a alors pu regretter que l’ancien pensionnaire d’AG2R n’ait pas eu un statut de coureur protégé au départ de la Doyenne. Il a ensuite à nouveau levé les bras au Tour des Asturies. Il va se présenter au Giro en tant qu’équipier de luxe d’Alejandro Valverde. Et si c’est le Carlos Betancur de 2013 qui est de retour, gare aux dégâts. On le sait fantasque avec un tempérament porté vers l’offensive. Dans un rôle de dynamiteur et d’électron libre, il pourrait bien aller accrocher quelques étapes sur ce Giro 2016 et si le scénario s’y prête, on pourrait également le retrouver dans le top 10 à Turin.
« Matteo Busato en chasseur d’étapes »
Arthur Pineau
Côté coup de cœur, ou pari osé, je miserai une petite pièce sur un Italien, Matteo Busato. Pourquoi ? Déjà, un bon Tour du Trentin, avec une onzième place à la clé, et une deuxième place sur la dernière étape derrière Tanel Kangert et devant Mikel Landa. Ce coureur est, à 28 ans, à une période importante de sa carrière. De plus, il est dans une équipe invitée, Willer – Southeast, dont le leader est un certain Filippo Pozzato. Ces équipes sont celles qui ont le plus à cœur de se montrer, alors ses bonnes performances sur le Tour du Trentin, le fait d’être à domicile ou encore d’être dans une équipe invitée va surement lui donner des fourmis dans les jambes, et s’il ne joue pas les accessits pour le général, je pense qu’on peut le retrouver sur quelques étapes afin de le voir lever les bras.
« Pirazzi monte en puissance »
Gaulthier Lenôtre
Comment ne pas mentionner Stefano Pirazzi? Ne pas citer le coureur de la Bardiani CSF serait une erreur tant celui-ci a pris l’habitude d’y briller. Il faut dire que chez la formation italienne, le Tour d’Italie représente un objectif de taille où tous les coureurs ont à cœur de briller, ce qui est le cas pour Stefano Pirazzi. Leader de son équipe une nouvelle fois cette année, celui-ci pourrait bien s’orienter vers la victoire d’étape comme il avait fait en 2014 avec succès. Baroudeur, l’italien apprécie particulièrement les étapes pentues sur lesquelles il peut exprimer tout son talent, à l’image de sa victoire du classement du grimpeur sur le Giro 2013. L’épreuve italienne est véritablement sa course de cœur. Et si l’an dernier, Pirazzi n’as pas levé les bras sur le Giro, il n’aura cessé d’être à l’avant.
Ces derniers temps Pirazzi monte en puissance. Vainqueur de la 4ème et dernière étape de la Semaine Internationale Coppi et Bartali où il s’est également classé quatrième du général, il s’est plus particulièrement démarqué dernièrement sur le Tour du Trentin sur lequel il termine 12ème au classement final, mais surtout en terminant les étapes pas loin des favoris, mais surtout devant Vincenzo Nibali. De quoi avoir confiance en Pirazzi, définitivement « habité » par ce Giro où il a l’habitude de s’illustrer.
« Jakub Mareczko, hériter de Nicola Minali et Ivan Quaranta »
Olivier Perrier
Un Giro, comme tout bon Grand Tour qui se respecte, ça se doit de nous offrir quelques beaux sprints massifs. Et si nous nous attendons tous à voir Caleb Ewan se distinguer dans le domaine, moi je vous annonce que la terreur des sprints de ce Giro sera Jakub Mareczko. Et comme vous l’avez lu, je ne suis pas le seul à le penser. Oh, ce ne sont pas ses 10 victoires acquises en Chine en fin de saison passée qui font de lui un pur-sang incontournable. Néanmoins, elles lui ont permis de lui offrir le gout de la gagne. Résultat cette saison, le tout jeune italien (22 ans) a commencé à aligner du beau monde. Viviani, Sagan et Richeze au San Luis et aussi Greipel et Modolo sur le tout récent Tour de Turquie. Râblé et explosif, Mareczko rappelle en certains points Nicola Minali, sprinteur italien des années 90 qui possède deux Paris-Tours et quelques étapes sur les trois Grands Tours au palmarès ou encore Ivan Quaranta, fantasque rival de Cipollini et porteur du premier rose en 1999. De quoi suivre de près Mareczko dès le premier emballage final, tant celui-ci peut être mouvementé et surprenant sur les Grands Tours et à fortiori sur le Giro, de quoi voir sortir du chapeau un happy Jakub !
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