Retour sur une très belle journée pour Le Dérailleur avec notre passage sur la dernière étape du Tour de Picardie, disputée sous un soleil de plomb !
Le contexte.
Oui, cette dernière étape entre Cap’Aisne-Chamouille et Bray-sur-Somme était décisive. C’était, d’une part, l’occasion de faire retomber l’épreuve dans l’escarcelle d’un français et, d’autre part, la possibilité pour le sprinteur picard du peloton, Arnaud Démare, de lever les bras chez lui, suite à ce triptyque composant ce Tour de Picardie 2014. Pour rappel, c’est Bryan Coquard (Europcar) qui avait ouvert son compteur sur la première étape. Le lendemain, Arnaud récupérait la tunique jaune de leader suite à sa victoire du côté de Craonne, devant Ramon Sinkeldam (Giant) et Rudy Barbier (RoubaixLM). Bryan Coquard se retrouvait sur la troisième place du podium, à 11 secondes du leader de la FDJ.fr. Cette dernière étape était donc décisive par bien des aspects !
Bienvenue en Picardie.
Départ de Lille, ce matin, pour rejoindre les terres picardes, pour certains, cela revient au même. Je vous assure que non ! Après pas mal de bornes sur autoroute, on est ravis de s’engouffrer dans la campagne : verte, ensoleillée et frénétiquement animée par les chants d’oiseaux. Alors que le peloton est déjà en selle, nous arrivons de notre côté sur le « village arrivée ». Oui, village est le bon terme mais un village tout en relief ! La dénivelée est agréable et le dépaysement assuré. Il ne manquerait que quelques cigales pour se croire dans le sud, j’exagère à peine !
C’est calme, même très calme en ce tout début d’après-midi. On se demande même si nous sommes au bon endroit. Mais, après quelques minutes, nous atteignons le pied de ce final du Tour de Picardie. Car oui, le parcours se termine en haut d’une belle petite bosse sur les hauteurs de Bray-sur-Somme. Afin d’avoir bien en tête le dernier kilomètre de l’étape, nous laissons la voiture et nous nous engageons sur le bitume surchauffé. Le public commence déjà à arriver, c’est toujours impressionnant de voir des personnes venir s’installer plusieurs heures avant le passage du peloton pour espérer les apercevoir une poignée de seconde. Les supporters contribuent aussi énormément à la beauté de ce sport. La passion et l’ambiance sont déjà là, et ce n’est pas l’ambiance du côté de la buvette qui nous fera mentir !
Pas mal de cyclotouristes se cassent les jambes dans la côte finale, pas question de mettre le pied à terre pour les courageux, littéralement ruisselants lorsqu’ils atteignent enfin la ligne d’arrivée. Précéder les idoles, c’est chose faite pour une poignée de méritants sous les cris et applaudissements d’enfants, en nombre sur les bords de la route. Pendant ce temps, la foule commence à s’étoffer et les pronostics vont bon train. Mais surtout un nom revient ici sur les terres picardes : Arnaud Démare, le grand favori du jour est porté dans le cœur d’une grande partie du public, parfois venu assister à la course juste pour croiser le gamin de Beauvais. On en profite pour discuter un peu avec quelques passionnés venus de Belgique et dont le final semble leur faire croire à, pourquoi pas, une victoire de Philippe Gilbert. Pourquoi pas. La ligne d’arrivée est atteinte, beaucoup de monde s’entasse au bord de celle-ci : voir le vainqueur d’étape lever les bras, cela n’a pas de prix ! Mais attention à l’insolation car cela cogne vraiment et l’ombre se fait rare.
Ils sont en avance !
Pour profiter de la ferveur, pourquoi ne pas redescendre jusqu’au pied de l’ascension et la regrimper une dernière fois ? Allez, c’est parti. Le temps de discuter avec les personnes au bord de la route, on se rend vite compte que cette course n’attire pas que les fanas de cyclisme à l’image de Rolland, cinquantenaire souriant, qui avoue ne pas suivre le vélo mais respecter énormément la difficulté de la discipline. Tout le monde a le droit à sa petite photo dans la montée, quitte à ennuyer les motards et voitures officielles qui débarquent, de plus en plus pressées. Oui, car ils sont en avance. C’est avec 15 minutes en amont sur l’horaire annoncée que les échappés vont rejoindre le circuit de Bray-sur-Somme où ils effectueront deux passages sur la ligne avant d’en terminer lors d’un troisième et dernier franchissement.
Un final haletant.
Alors que les invités se délectent à l’ombre des quelques parasols, les échappés franchissent pour la première fois le final en pente. On sent que les jambes se font lourdes. Personne autour de nous n’y croit vraiment et, à vrai dire, n’espère pas vraiment voir les fuyards récompensés de leur audace. Pourquoi ? Car tout le monde attend l’enfant du pays ! C’est le belge Victor Campanaerts (TopSport) qui mène le petit groupe composé de Gert Jõeäär (Cofidis), Kévin Reza (Europcar) et du lituanien Edvaldas Siskevicius (LaPomme). On sent bien que le coureur de la formation Topsport Vlaanderen en a encore sous la pédale et cela va se vérifier ! Dès le second passage, le groupe d’échappés a explosé : Campanaerts tente un raid en solo mais c’était sans compter sur la FDJ.fr d’Arnaud Démare qui reprend tout ce beau petit monde durant le dernier tour de circuit.
Vous n’allez pas être surpris mais c’est à la vitesse de l’éclair que le peloton de ce Tour de Picardie avale le dernier tour de circuit. Cela s’agite, le public s’enflamme pour ses favoris et pas mal de noms résonnent : Gilbert, Démare et Coquard semblent principalement très attendus ! Même pas le temps de voir le train bleu de ses coéquipiers que le maillot jaune sur les épaules, Arnaud Démare surgit ! Deux bonnes roues d’avance à 20 mètres de la ligne et on sait déjà que la bosse n’aura eu aucune incidence sur les qualités du sprinteur picard.
De l’émotion, en veux-tu, en voilà.
C’est le moment pour nous de filer en coulisses. Nous avons la chance de nous retrouver dans le coeur de la machine. Les principaux protagonistes de la course sont là ainsi que quelques invités d’exception, nous citerons bien évidemment Bernard Hinault pour illustrer ce propos. Jean-François Pescheux est aussi présent, d’ailleurs le tandem Hinault-Pescheux devrait prendre en main la course en 2015 suite au désengagement d’ASO. Un beau défi pour les deux hommes.
Arnaud Démare descend de sa monture, un sourire qui ne trompe pas, une émotion palpable alors que Daniel Mangeas annonce l’arrivée du père du coureur. Le regard du champion s’illumine, se brouille presque au moment des retrouvailles d’après-course. «J’étais encore dans la poussette que j’encourageais déjà mon père sur le bord de la route. Je l’ai vu gagner plein de fois. Il était ma première idole» confiait d’ailleurs Arnaud en 2012. Maintenant, c’est Josué qui vient féliciter son fils après ses victoires qui ne cessent d’étoffer un palmarès dont les plus belles lignes restent à écrire.
Le protocole se poursuit avec le podium : Arnaud vainqueur d’étape, Arnaud vainqueur du classement général, Arnaud vainqueur au classement du meilleur sprinteur… et Arnaud, ah non ! Philippe Gilbert vient endosser le maillot de meilleur grimpeur de ce Tour de Picardie, le seul maillot distinctif que le leader de la FDJ.fr ne briguait pas. C’est au pied du podium que j’ai le plaisir de retrouver Yannick Talabardon accompagné de Jimmy Casper, une bien bonne journée !
Un petit clin d’oeil à Monsieur Bernard Hinault qui semble exceller dans sa nouvelle tâche du costumier, des sourires toujours pour ne rien gâcher. Ramon Sinkeldam réajuste les bouclettes sous sa casquette et rejoint le podium final de l’épreuve où il retrouve, bien sûr, Arnaud mais aussi Bryan Coquard qui ne semble visiblement pas comblé par sa troisième place.
Arnaud Démare, sprinteur au grand coeur.
Une fois ce beau petit monde de retour à l’arrière du podium, Bryan Coquard prend le temps de commenter sa course. J’insiste, on le sent pas vraiment convaincu et c’est un petit peu déroutant de le sentir si déçu. Pourtant, avec une victoire d’étape à son compteur et la troisième place du classement général, tout n’a pas été si infructueux sur les routes picardes.
Bien sûr, ce n’est pas du tout le même son de cloche du côté d’Arnaud qui s’installe sur le tabouret, un poil bancal, dédié à la conférence de presse. Tout le monde se rue sur lui mais il prend le temps de répondre à tous. Une fois le brouhaha apaisé et la presse rassasiée, la proximité avec le vainqueur grandit un peu plus. Le champion n’est pas pressé, il prend le temps des photos avec ses admirateurs massés en nombre le long des barrières. Une petite fille, haute comme trois pommes, s’approche timidement d’Arnaud. Une très jeune admiratrice avec un petit cadeau, Arnaud le déballe avec grand plaisir et découvre le bracelet qu’il contient. On le sent très touché par la délicate attention, il glisse à la petite Célia qu’il revient la voir. Il s’éclipse.
Chose promise, chose due. Arnaud revient avec le bracelet offert au poignet. Il n’a pas les mains vides, bien au contraire. Un beau maillot jaune fraîchement déballé qu’il offre à sa petite admiratrice, qui n’en revient toujours pas. Que dire de plus ? Arnaud Démare n’est pas uniquement un champion au moment d’emballer le final des étapes, c’est aussi un champion exemplaire par son attitude lorsqu’il descend de son vélo. Un type bien comme on aimerait en croiser plus souvent dans ce sport.
Le regard de Yannick Talabardon sur ce Tour de Picardie :
Arnaud Demare et toute l’équipe FDJ.fr ont fait aussi bien qu’aux 4 jours de Dunkerque ; 2 victoires d’étapes et le général. Arnaud a surtout confirmé qu’il était un coureur complet, capable aussi de s’imposer lors de sprint en côte. La révélation de ce tryptique est Rudy Barbier, 3ème de la seconde étape et 5e au général. A noter, la belle 5e place, lors de la dernière étape, de Maxime Daniel qui lui permet de décrocher un nouveau top 10 au Tour de Picardie.
À l’année prochaine la Picardie et merci pour cette belle journée !