Il fallait être bien échauffé ce matin pour prendre le départ de la 9ème étape de ce 101ème Tour. Les 8,6 km de montée du Col de la Schlucht, dès la sortie de Gérardmer, allait inspirer bon nombre de baroudeurs à la quête d’une étape, que les favoris allaient laisser filer à la veille de la première étape de montagne.
Par Olivier
Dès le deuxième kilomètre de l’étape, une vingtaine de coureurs s’isolent en tête de la course dont Voeckler (Europcar), qui passera en tête à la Schlucht, ou en encore Rodriguez (Katusha) qui, pour la première sur ce Tour, pointe le bout de son nez. Peu après, le peloton revient, mais ne restera pas groupé longtemps.
A l’abord de la descente, Alessandro de Marchi (Cannondale) révélation du Dauphiné 2013, part à l’attaque très vite rejoint par le héros du jour, Tony Martin(Omega-Pharma) . Les deux coureurs sont encore à 150 km de l’arrivée, mais les voilà parti pour une belle chevauchée. Derrière eux, près d’une trentaine de coureurs forment un groupe de contre. Un groupe dans lequel on retrouve Rojas (Movistar), Rodriguez et Spilak (Katusha), Paulinho (Tinkoff), Koren (Cannondale), Boom, Kuijswijk (Belkin), Chérel, Montaguti (AG2R), T.Dumoulin (Giant), Valls (Lampre), Ladagnous (FDJ), Gallopin (Lotto), Moinard et Van Avermaet (BMC), Rolland, Gautier, Pichot, Quemeneur et Reza (Europcar), Cancellara (Trek), Navarro et Edet (Cofidis), Meier (Orica), Chavanel (IAM), Machado (NettApp), Feillu et Bideau (Bretagne). Parmi ces 28, le mieux placé au général est Tony Gallopin. Le français se doutait bien qu’à la veille de la première étape de montagne, Nibali ne défendrait pas bec et ongles son maillot jaune. Il savait là qu’une belle occasion se présentait à lui. Enfin, la sur-représentation des Europcar laissaient penser que les deux hommes de têtes auraient du mal à tenir, mais c’était sans compter sur la force de Martin et sur l’absence de collaboration chez les contre-attaquants.
Alors qu’on imaginait que Martin laisserait les points de tous les cols à de Marchi, le « Panzerwagen » (le tank, en allemand) allait surprendre tout le monde en attaquant avant le sommet du Markstein. A 59 kilomètres de l’arrivée, le voici parti pour un joli contre-la-montre et un bel exploit, puisqu’il maintiendra à plus de 2 minutes ses poursuivants. Mais parmi-eux, ça bouge dans le final. Tony Gallopin craignant que le peloton se rapproche, place une accélération entraînant avec lui Mikaël Chérel. Les 2 français seront revus, mais Gallopin peut compter dans le final sur un ex-coéquipier, Fabian Cancellara. Spartacus, qui estime beaucoup l’orléanais, n’hésitera pas à lui filer un coup de main. Gallopin se parera donc de jaune.
C’était une journée pour les Tony, à Martin l’étape, à Gallopin le maillot jaune. Difficile enfin, de ne pas penser à une autre arrivée d’étape à Mulhouse dans l’histoire du Tour. En 1992, Laurent Fignon s’était imposé de la même façon que Tony Martin aujourd’hui, à l’issue d’une belle échappée solitaire. Et puis parce que le masseur de Fignon était Alain Gallopin, l’oncle du nouveau maillot jaune, Tony. C’est un beau symbole, comme souvent le Tour de France met en lumière.
Par le duo des tops/flops : Olivier (Tops) et Tibaldi (Flops)
LES TOPS
1. Tony Martin
Le rouleur allemand eu droit à un beau cadeau hier, son équipe lui à fait confectionner une belle casquette. La visière de celle-ci étant ornée des son surnom, Panzerwagen (soit le Tank dans la langue de goethe). Et pour les remercier, le « Panzewagen » aura réalisé un coup de force dont il à le secret. 150 km d’échappée, dont les 59 derniers en solitaire pour aller gagner sa première étape en ligne sur le Tour et ce, en gardant un écart oscillant entre 2 et 3 minutes, de la belle ouvrage. On craignait que l’équipe Omega-Pharma Quick-Step allait être démobilisée après l’abandon de Mark Cavendish, on aura pu voir après les victoires de Trentin et de Martin aujourd’hui qu’il n’en fut rien. Maintenant Tony peut tranquillement se diriger vers son autre objectif sur ce Tour, le contre-la-montre en Dordogne.
2. Tony Gallopin
Très en vue depuis le début de ce Tour de France (3ème de l’étape de Nancy et dans le Top 10 du général avant Gérardmer), Tony Gallopin est venu chercher ici une belle consécration. Le français aura la chance de porter le maillot jaune un 14 juillet comme avant lui, Thomas Voeckler, Cédric Vasseur ces 20 dernières années. Déjà porteur du maillot blanc en 2012 et vainqueur de la Clasica San Sebastian l’an passé, ce maillot jaune couronne les qualités de l’Orléanais dont la polyvalence est un atout. Un coureur de classe dont le palmarès pourrait se voir garnir de belles classiques les saisons à venir. Pas dit non plus qu’il ne claque pas une étape d’ici Paris. Quelques étapes présentes un parcours propice à ses qualités, çà suivre donc.
3. Fabian Cancellara
La présence de Spartacus sur ce Tour semblait être justifié par l’étape Ypres-Arenberg. N’ayant pas eu de prologue à se mettre sous la dent, le suisse voyait ici la seule raison de venir s’embarquer dans 3 semaines de galère pour lui. Pas de leader à protéger pour jouer le podium chez Trek, un seul contre-la-montre individuel, bref pas de quoi emballer le triple vainqueur de Paris-Roubaix. Après son échec à Arenberg, où Boom fut éblouissant, Cancellara laissait transparaître son vague à l’âme depuis quelques jours. Néanmoins, aujourd’hui il nous aura une nouvelle fois démontré sa classe. Présent dans le groupe de contre, il n’aura pas hésité dans le final à passer de longs relais pour entraîner Tony Gallopin vers le maillot jaune. Spartacus n’à pas oublié les deux années passées par Gallopin chez Radio-Shack, pendant lesquelles il le prit sous son aile. L’orléanais qui à beaucoup travaillé pour le suisse durant ces 2 saisons se voit ici remercier d’une bien belle manière. Classe de la part de Spartacus.
LES FLOPS
1. Pierre Rolland et Europcar
Le bilan de la journée pour les hommes de Bernaudeau est tout à fait paradoxal : Pierre Rolland a profité de son retard au général pour obtenir un bon de sortie de la part du peloton et… se rapprocher des meilleurs au général ! C’est à ne rien y comprendre ! Le grimpeur français, brillant 4ème du dernier Giro, le dit lui-même : il ne récupère pas comme il l’espérait, et a perdu régulièrement du temps sur les principaux favoris du Tour (1’20 hier sur Contador à l’issue d’une montée finale de moins de 2km !). Alors à quoi bon s’entêter à viser le général ?! Il disposait de 4 équipiers dans le groupe de chasse, ils n’ont pas été capables de revenir en début d’étape sur le duo De Marchi-Martin et n’ont pas semblé vouloir en faire trop non plus.
Résultat, Pierre Rolland sera beaucoup plus surveillé ces prochains jours, il n’a pas récupéré quoi que ce soit dans la course au maillot à pois, et risque de craquer un peu plus chaque jour, au fur et à mesure que la course se durcira. Il a loupé son Tour l’an passé en voulant trop en faire, et il ne semble pas forcément avoir tiré les leçons de son échec. Espérons que la suite me fera mentir !
2. Purito Rodriguez
Il a fait la course aux petits points pour le classement du meilleur grimpeur, alors qu’on aurait tellement aimé le voir s’envoler dans le Markstein puis le Grand Ballon pour revenir sur Tony Martin et aller cueillir une belle victoire. Dommage qu’un aussi beau coureur doive se contenter de si peu, surtout à la veille d’une très belle étape de montagne dont l’arrivée pourrait lui convenir. Les gros points pour le maillot à pois, il y en aura aussi beaucoup demain…
3. Vincenzo Nibali
Il a fait rouler son équipe toute la journée, pour finalement céder le maillot jaune pour plus d’une minute. Pas sûr que tout ça soit totalement maîtrisé. Bizarre de le perdre « volontairement » aujourd’hui, alors que la bagarre sera énorme demain et qu’il devra batailler face à Contador et consorts. S’il leur résiste, il récupérera probablement le paletot de leader. Certes, son équipe n’aura pas à le défendre en début de journée, mais elle roulera quand même pour placer au mieux son leader. Disons que le « requin de Messine » s’est dispensé du podium protocolaire ce soir, c’est déjà ça…
Aujourd’hui, un français à marqué l’étape, en prenant le maillot jaune, c’est Tony Gallopin! Issu d’une grande famille de vélo, le coureur de la Lotto est brillant, et surtout des plus prometteurs.
Tony Gallopin démarre le vélo à l’âge de 9 ans, mais c’est beaucoup plus tard qu’il se révélera. En effet, ses années ou il fut junior, puis espoir furent prolifiques : de ses deux médailles de bronze, sur l’épreuve en ligne et le contre la montre des championnats du monde junior, à son titre de champion de France du contre la montre espoir, et enfin de Paris-Tours espoirs, le petit Galopin semble être beaucoup plus doué que son cher papa Joël. Équipier d’un certain Joop Zoetmelk sur le Tour de France 1980, il n’eut jamais de grands résultats, mais participa à la victoire de l’hollandais volant. La jeunesse est donc belle, mais arrive l’heure de confirmer pour le jeune Tony, et ça, il le fait plus que bien. En 2010, il remporte sous les couleurs de Cofidis sa toute première victoire professionnelle : une étape du Tour du Luxembourg ! Cependant, c’est en 2013 qu’il remporte la plus belle victoire de sa carrière, et pas des moindres, celle où des coureurs comme Indurain, Valverde ou Gilbert ont brillé : la Clásica San Sebastián! Il devance, s’il vous plait, Alejandro Valverde et Roman Kreuziger au terme d’une course des plus somptueuses. Enfin, un an après, il réalise une nouvelle fois une superbe saison : 3ème de la Flèche Brabanconne, 6ème du GP de l’E3.
Aujourd’hui, il accomplit l’un des plus grands exploits de sa carrière : il prend le maillot jaune à Vincenzo Nibali, dans la ville de Mulhouse. Sous les yeux de son tonton , Alain Gallopin, qui, dans sa voiture de directeur sportif devait avoir une pensée énorme d’une part pour son neveu, mais aussi pour celui qui était l’un de ses meilleurs amis : Laurent Fignon. Grand champion qu’il était, c’est dans cette même ville qu’il a remporté sa dernière étape sur la Grande Boucle. Demain, un 14 juillet, des millions de français pourront voir, ou même découvrir Tony Gallopin, vêtu de son maillot jaune. Mais à 26 ans, ce ne pourrait être qu’un détail dans les prochaines années. En effet, il possède un potentiel énorme, et pourrait selon son oncle, viser dans deux ans un top 10, voir top 5 d’un Grand Tour. Pour l’Orléanais, ce n’est pas encore l’heure d’une telle performance, et viserait plutôt une victoire d’étape sur le Tour. Qu’on se le dise, il vaut bien mieux que ça et l’avenir nous le dira !